Le plantain - Ami ou ennemi de nos chevaux ?
Les incroyables propriétés médicinales du plantain.
Le plantain est une plante herbacée vivace à tige non ramifiée et dont les feuilles glabrescentes, à nervures convergentes, sont disposées en rosette basale. L’inflorescence regroupe des fleurs minuscules (du type 4) et consiste en un épi (cylindrique ou ovoïde, selon l’espèce). La taille des feuilles peut fortement varier en fonction de la disponibilité en eau et en nutriments du sol.
Les plantains les plus communs sont : Plantago major, P. media et P. lanceolata. Ils appartiennent à la famille de Plantaginacées.
Ils apprécient les sols piétinés de type "pelouses" ou prairies et sont très communs (sauf P. media qui ne pousse que sur les sols calcaires).
Ce sont des plantes qui présentent de nombreux attraits, tant sur le plan nutritionnel que médicinal.
Pour autant, il ne s’agit pas de vouloir en semer partout dans nos prairies !… Voyons d’un peu plus près ce que le plantain a à nous apporter et pourquoi il faudra tout de même s’en méfier au pâturage…
Les différents plantains couramment utilisés en phytothérapie :
1) Plantago psyllium : cette espèce ne rencontre peu à l’état sauvage (il est surtout présent dans les régions sablonneuses du sud de la France). Par contre, elle est généralement bien connue des détenteurs d’équidés car le « psyllium » (graines issues de ce plantain, notamment), renferme en son sein un mucilage qui lui confère des propriétés émollientes intéressantes en termes de régulation du transit intestinal (voire à cet égard, le très intéressant partage d’expérience de Cheval-herbage : c'est par ici !).
Ces propriétés adoucissantes seront également utiles dans le cas d’inflammations oculaires (en collyre).
Sa consommation permet également de réduire le mauvais cholestérol et la glycémie, ce qui sera intéressant chez nos SME, par exemple. Notez qu’il s’agit d’une utilisation en phytothérapie humaine mais dont les principes sont transposables en équine.
Attention, toutefois, à toujours vous faire accompagner par un vétérinaire spécialisé en phytothérapie pour éviter tout usage abusif qui donnera lieu à des effets secondaires non souhaitables.
Pour des informations complémentaires sur le psyllium, lire l’article d’Althéa Provence (toujours au top, comme d’habitude !) : c'est par ici !
2) Plantago major (le plantain majeur) :
Largement répandu sous nos contrées, il se retrouve peu dans les prairies « bien gérées » mais plutôt dans les lieux incultes ou sur le bord des chemins, avec une préférence pour les sols compactés. Il est facilement reconnaissable, grâce à ses larges feuilles ovales et épaisses, partant de la base de la plante et formant une rosette au-dessus du sol. A la différence du plantain moyen (Plantago media) qui présente les mêmes propriétés, les feuilles du plantain majeur possèdent un pétiole net aussi long que leur limbe. Les fleurs sont minuscules et positionnées sur un épi fin, au port dressé.
3) Plantago lanceolata (le plantain lancéolé) :
Très couramment rencontré dans nos pâtures, il possède des feuilles caractéristiques et un épis plus trapu qui le distinguent de son cousin. Il résiste incroyablement bien à la sècheresse et au piétinement, ce qui a amené les semenciers à le sélectionner dans le cadre de la production de fourrage pour le bétail à l’engraissement, notamment.
Même si la coutume associe parfois davantage le plantain lancéolé aux affections respiratoires (usages internes) et le plantain majeur aux problèmes dermatologiques (usages externes), ces deux espèces peuvent être utilisés de façons similaires et présentent de très nombreuses vertus.
Les feuilles sont utilisées en usage interne (le plus souvent en infusion) dans le cadre de pathologies respiratoires ou digestives.
En usage externe, l’infusion intervient comme traitement de la conjonctivite, grâce à ses composés anti-inflammatoires et adoucissants. Il sera également utile pour soigner les affections cutanées (en pommade ou décoction). Le jus vert obtenu à base de feuilles de plantain sera un calmant et un adoucissant efficace dans le cas de brûlures ou de piqûres (orties, insectes) ou autre irritation de la peau.
Il est à noter que le plantain possède une activité antibactérienne intéressante (grâce à l’action d’une enzyme qui est désactivée par la chaleur). Cette propriété est donc limitée à l’utilisation de jus vert, d’extraits aqueux et réalisés à froid. Pour renforcer cette activité, on pourra ajouter une pincée de sel, du vinaigre ou de l’alcool à la préparation (ne pas mettre en contact avec les yeux !).
De plus, on le déconseillera aux juments gestantes, en raison d’un effet stimulant sur l’utérus (emménagogue).
Composés actifs de la plante : Mucilages, gommes, tanins, soude, sels de potassium, chlore, magnésium, acide silicique, glycosides iridoïdes (dont catalpol et aucubine – à effet anti-bactérien) et flavonoïdes (dont apigénine – anti-inflammatoire), de glucosides phénoliques et verbascosides aux effets anti-inflammatoires.
Résumé des propriétés : anti-tussif, mucolytique, anti-inflammatoire, immuno-modulant (en cas d’allergie,…), anti-infectieux (en frais), anti-oxydant et cytoprotecteur.
Exemple d’utilisation :
En cas d’ulcères gastriques : Plante fraiche ou sèche directement dans l’alimentation (on le préfèrera à la consoude qui, elle, est toxique du fait de la présence d’alcaloïdes pyrrolizidiniques !). La dose par jour dépendra du cheval : entre 50 et 100 g de plante sèche ou laisser pâturer (cf. point suivant). En synergie avec les téguments (psyllium + eau !), de la Reine-des-Prés (20-30 gr), de la racine de guimauve (50 gr).
En cas de toux : 50 gr de feuilles sèches, sous la forme de tisane non filtrée, directement dans la ration, en synergie avec de la racine de guimauve (30 à 50 gr). NB : Une décoction à froid ou dans de l’eau tiède préservera mieux l’action des mucilages.
Irritations oculaires / conjonctivite : 5 gr de feuilles sèches dans 20 cl d’eau frémissante (durée d’infusion : 5 minutes). A utiliser en compresse sur l’œil, éventuellement en synergie avec des fleurs de camomille, de bleuet ou d’euphraise (filtrer !).
Blessures superficielles ou irritations cutanées (piqûres, allergies, eczéma, etc.) : Jus vert ou décoction de la plante entière (+ une pincée de sel, 15% d’alcool à 70° ou 6% de vinaigre blanc alimentaire). On peut également faire une infusion de la plante entière (80-100gr/litre) qui sera ensuite appliquée en compresse sur la plaie.
Attention : Comme toutes les médecines, la phytothérapie ne doit pas faire l’objet d’automédication. En cas de doute ou si vous êtes face à une pathologie grave (notamment lors d’atteinte au niveau des yeux) faites toujours appel à l’avis d’un vétérinaire qui pourra vous guider et éventuellement vous prescrire des traitements complémentaires et compatibles.
De la même façon, il faudra toujours chercher à comprendre la cause de l’apparition du problème. Ainsi, les ulcères gastriques sont souvent la cause d’une alimentation non adaptée (typiquement, trop riche en amidon) ou pourront être liés à l’existence d’un stress chronique.
La toux peut être causée par un agent infectieux ou liée à une allergie ou à une sensibilité respiratoire (poussières du foin par exemple), etc.
Traiter uniquement les symptômes ne suffira donc pas !
Le semer en prairie ? Une fausse bonne idée !
Nous l’avons vu précédemment, le plantain semble être une plante miracle que nous aurions tous intérêt à cultiver dans nos prairies. Certains semenciers « alternatifs » l’on bien compris, puisqu’ils le proposent régulièrement dans leurs mélanges de semences « adaptées aux chevaux ».
La problématique « de l’incompatibilité agronomique » de ce type de mélanges a déjà été soulevée ; nous allons à présent voir qu’ils peuvent également entrer en contradiction avec la santé des chevaux et, ce, de manière pourtant contre-intuitive…
En réalité, les semences de plantains lancéolés que nous retrouverons dans ces mélanges sont, dans une très grande majorité de cas, issues de variétés sélectionnées pour l’agriculture (cf. la variété CERES Tonic). Il s’agit de plante particulièrement riches en sucres, classiquement utilisées pour l’engraissement et l’élevage du jeune bétail.
Le plantain est effectivement riche en sucres (dont des fructanes et des raffinoses – qui représentent la majorité de ses réserves en hydrates de carbone). C’est une des raisons qui explique qu’il résiste si bien à la sècheresse et au piétinement.
Autrement dit, selon le mode de gestion de la prairie et la météo, il peut rapidement se développer au sein du couvert végétal. On comprendra aisément ce que cela implique sur le plan nutritionnel pour nos chevaux avec une tendance à la prise de gras et un risque élevé de fourbures, surtout pour les plus sensibles d’entre eux. On évitera donc de laisser notre poney préféré, à la diète, sur un paddock surpâturé et rempli de plantain.
De plus, le plantain étant une plante indigène de nos régions, il est naturellement présent dans la plupart des prairies, ou pourra s’y développer spontanément si l’on adopte une gestion réfléchie qui lui convienne.
Le semer ne servira donc à rien (sauf à conduire aux éventuels problèmes précités).
Il sera d’ailleurs possible d’en augmenter la proportion ou, au contraire, de la diminuer, en jouant sur les modalités d’exploitation du couvert.
Ce principe étant vrai pour la plupart des espèces prairiales, qu’elles soient toxiques ou non !
En conclusion :
Le plantain est une plante aux très nombreuses vertus. Sa présence modérée, dans nos prairies ou aux abords de celles-ci, représente un intérêt réel.
Pour autant, il faudra garder en tête que c’est également une plante potentiellement (très) riche en sucres qui ne devra pas faire partie de l’alimentation de base du cheval en trop grande quantité : quelques individus sauvages dans le couvert, c’est ok, mais les mélanges agricoles qui nous vantent ses propriétés médicinales ne sont pas pertinents.