Fourbures : et si l'herbe épiée était le danger ?

Pour les chevaux sensibles, la mise à l'herbe peut représenter un réel casse-tête !
Une herbe trop riche en sucres, ingérée en grandes quantité est bien connue pour augmenter le risque de fourbure. Parmis les trucs et astuces qui circulent sur le net, il est souvent conseiller d'attendre que l'herbe pousse avant d'y mettre les chevaux.
Ainsi, une herbe plus haute et épiée représenterait un risque moins grand. Si cette idée repose sur des principes en théorie corrects : une herbe à un stade génératif plus avancé est plus pauvre en sucres solubles et moins digeste ; dans la pratique, le pilotage des herbage est beaucoup plus complexe !
Avant d'aller plus loin, petit rappel sur la fourbure.
La fourbure est une inflammation des tissus sensibles du pied, notamment du laminae, qui assure l’ancrage du sabot à la phalange distale. En cas de fourbure, cette structure s’enflamme, se décolle, et les conséquences peuvent aller de la douleur intense à la bascule de la troisième phalange. Oui, c’est grave.
Les causes de cette atteintes peuvent être multiples et complexe !
Parmis eux, citons :
- L'obésité (entrainant une inflammation chronique à bas bruit)
- Une dérégulation hormonale : Dysrégulation de l'insuline (ID) / Hyperinsulinémie ou maladie de "Cushing" (PPID pour Dérèglement de la Pars Intermedia de l'Hypophyse)
- Une absence prolongé de mouvement ou un effort mécanique inadapté
- Une infection sous-jacentes comme la maladie de Lyme
- La prise de certains médicament (comme les corticostéroïdes qui diminuent la sensibilité tissulaire à l'insuline et augmentent les concentrations d'insuline dans le sang)
- Apports excessifs de sucres solubles ou d'amidon dans la ration
- Infection bactérienne et endotoxémie liée, par exemple, à une rétention placentaire, dérive de flore, etc.
Nous comprenons déjà que de nombreuses causes trouvent leur origine directe ou indirecte dans l'alimentation !
A cet égard, le fourrage et donc l'herbe, vont jouer un rôle important !
Herbe, sucres et printemps...
À cette saison (avril à juin, parfois plus tard selon les régions), la végétation explose. Et l’herbe, dans sa phase de croissance active ou de reproduction (quand elle monte en épi), peut contenir des teneurs élevées en sucres solubles (fructanes, glucose, saccharose...).
En alimentation équine, les sucres ne sont pas anodins : certains d'entre eux, quand ils sont aborbés en trop grandes quantités, peuvent favoriser certaines populations bactériennes et pertuber fortement le microbiote digestif, induisant une acidose intestinale, libérer des toxines, provoquer des déséquilibres métaboliques et... déclencher une fourbure.
Les sucres vont aussi avoir comme effet d'élever l'insulinémie (niveau d'insuline dans le sang), ce qui est aussi susceptible de conduire à un épisode de fourbure.
Herbe haute ou herbe rase ?
On entend souvent que l’herbe haute serait « plus sûre » et que l'herbe rase est un fléau
Et pourtant...
L’herbe "haute" n’est pas toujours moins sucrée ! Si elle est feuillue et encore verte, elle peut être très riche en glucides, surtout au printemps. Et en plus, comme il y en a beaucoup, le cheval en consomme de grandes quantités. Résultat : le combo parfait pour le déclenchement d’une fourbure.
En réalité, une herbe rase de fin d'hiver, pâturée raisonnablement, et même si ce n'est pas souhaitable sur le long terme, d'un point de vue agronomique, peut parfois être moins risquée ... Car les quantités ingérées sont plus faible et que sa richesse en sucres n'est pas forcément plus élevée !
Une herbe épiée = faux ami !
L'herbe épiée est réputée moins riche en sucres.
Si c'est vrai d'une point de vue théorique, dans les faits, il faudra être extrêmement prudents !
En effet, toutes les graminées n'érrivent pas en épis au même moment ! Vous pouvez très bien avoir une prairie présentant déjà visuellement beaucoup d'épis dressés mais ayant encore énormément de graminées en feuilles, riches en sucres ! Et comme nos chevaux aiment trier... Les dégâts peuvent être réels.
L'impact de la météo
La météo est le chef d’orchestre du sucre végétal. Voici quelques points clés à retenir :
☀️ Si la journée est ensoleillée, la plante produit beaucoup de sucre via la photosynthèse.
🌙 Si la nuit est froide (moins de 5–7°C), la plante ne respire pas assez pour consommer ces sucres.
→ Résultat : les sucres de la journées précédente restent présent et il y accumulation de sucre dès le lendemain, avec le retour des premiers rayons de soleil... Le risque augmente donc.
En revanche, lors de nuits douces (et si le sol est fertile, arrosé, vivant), la plante respire davantage et consomme une partie de ses sucres. La concentration au petit matin est alors souvent moins critique.
💧 Et l'effet de la pluie ?
Pas de pluie = croissance ralentie = sucre non dilué dans les tissus végétaux = accumulation de sucres également.
Que faire alors ?
→ Observer, anticiper, adapter !
Savoir si l’herbe est « dangereuse » demande :
- une bonne connaissance de la flore
- une lecture fine des conditions climatiques locales
- et surtout, une compréhension du métabolisme propre à chaque cheval (âge, antécédents, état corporel, pathologies...).
⛔ Ce n’est pas parce qu’un cheval est fin, sportif, “dans le sang”, qu’il est à l’abri. La fourbure n’épargne personne quand toutes les conditions sont réunies.
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Et surtout, prenez soin de vous, de vos chevaux… et de leur flore intestinale ! 🐴💚